Lubrifiants enrichis en agents stimulants : données cliniques sur leur tolérance et leur efficacité chez les femmes présentant une sécheresse vulvo-vaginale

Lubrifiants enrichis en agents stimulants : données cliniques sur leur tolérance et leur efficacité chez les femmes présentant une sécheresse vulvo-vaginale

La sécheresse vulvo-vaginale est un symptôme fréquent, touchant une proportion importante de femmes à différents âges de la vie, en particulier autour de la ménopause. Elle peut survenir dès la périménopause, mais aussi chez des femmes plus jeunes, notamment sous contraceptifs hormonaux, dans un contexte d’allaitement, de stress chronique ou de traitements oncologiques (chimiothérapie, hormonothérapie anti-estrogénique). On estime qu’entre 15 % et 30 % des femmes préménopausées et jusqu’à 50 à 60 % des femmes ménopausées en souffrent.

Il est important de souligner que cette sécheresse n’est pas uniquement vaginale: elle concerne l’ensemble de la sphère vulvo-vaginale, incluant les petites et grandes lèvres, le vestibule, l’introitus, et parfois même la zone périnéale. Cette condition est souvent sous-déclarée par les patientes, en raison de la persistance de tabous autour de la sexualité féminine et de la gêne à en parler en consultation. Or, elle a des répercussions notables sur la qualité de vie, l’estime de soi, la vie de couple et la fonction sexuelle.

Le traitement repose sur plusieurs axes : information, lubrifiants et hydratants, traitements hormonaux locaux (œstrogènes) ou non hormonaux (DHEA, laser). Parmi les mesures de première intention, les lubrifiants personnels sont recommandés pour pallier l’inconfort mécanique lors des rapports. Certains produits vont au-delà de la simple lubrification, en intégrant des agents dits “sensate” censés améliorer les sensations, grâce à des effets picotants, chauffants ou rafraîchissants.

Une étude intéressante vient d’être publiée dans le JSM. Elle évalue la tolérance et l’efficacité de deux de ces lubrifiants enrichis, en conditions d’utilisation réelle

Méthodologie et résultats

L’étude, randomisée en deux bras parallèles, a inclus des femmes présentant une sécheresse vulvo-vaginale. Les participantes ont été réparties en deux groupes : l’un utilisant un lubrifiant à base d’eau avec effet picotant, l’autre un lubrifiant à base de silicone avec effet chauffant. Chaque produit devait être utilisé au minimum une fois par semaine durant des rapports vaginaux pendant une période de 4 semaines.

L’objectif principal était l’évolution du score total du Female Sexual Function Index (FSFI). Les objectifs secondaires incluaient l’évolution des scores par domaine (désir, excitation, lubrification, orgasme, satisfaction, douleur), la survenue d’événements indésirables (EI), la tolérance locale (vulvo-vaginale et orale), ainsi que la perception subjective du couple (via questionnaires SPQ et échelle PGIC – Patient Global Impression of Change).

Parmi les 66 participantes ayant complété l’étude, une amélioration cliniquement significative (≥ 4 points) du score FSFI a été observée pour les deux lubrifiants. Tous les domaines du FSFI ont montré une progression positive. La tolérance a été jugée « bonne » à « très bonne » sur les plans vulvo-vaginal et oral. Aucun événement indésirable grave n’a été rapporté; tous les EI étaient d’intensité légère. Le taux d’abandon a été de 1,5 % (1 participante, bras ‘chauffant’).

Par ailleurs, la majorité des participantes et de leurs partenaires ont rapporté une amélioration de la fluidité de la pénétration et une perception accrue de l’intimité sexuelle.

Discussion

Ces données suggèrent que l’utilisation de lubrifiants contenant des agents sensoriels peut améliorer la fonction sexuelle féminine, au-delà de leur simple rôle mécanique d’hydratation. Leur bonne tolérance locale permet d’envisager leur recommandation dans le cadre de prises en charge de la sécheresse vulvo-vaginale, notamment lorsque celle-ci impacte la satisfaction sexuelle.

Limites de l’étude

L’échantillon manquait de diversité et les outils de mesure subjectifs utilisés, tels que le SPQ, ne sont pas validés cliniquement, ce qui limite la généralisabilité des résultats. Néanmoins, cette étude représente une première étape vers une meilleure compréhension de l’apport des lubrifiants « sensate » dans la prise en charge globale de la santé sexuelle.

Conclusion

Les lubrifiants enrichis en agents sensoriels apparaissent comme une option thérapeutique sûre et potentiellement efficace pour améliorer à la fois le confort et la fonction sexuelle chez les femmes présentant une sécheresse vulvo-vaginale. Ces résultats justifient des études complémentaires à plus grande échelle et avec des outils validés.

Krychman, Michael, et al. A randomized trial on the safety and efficacy of sensate water-based and silicone-based personal lubricants for relief of intimate discomfort associated with vaginal dryness. The Journal of Sexual Medicine (2025): qdaf058

 

 

REFERENCES:

 

 Kingsberg SA, Wysocki S, Magnus L, Krychman ML. Vaginal atrophy in postmenopausal women: a review of the literature on current treatment options. Int J Womens Health. 2013; 5:305–319.

 Nappi RE, Palacios S, Panay N, Particco M, Krychman ML. Vulvar and vaginal atrophy in four European countries: evidence from the European REVIVE Survey. Climacteric. 2016;19(2):188–197.

Portman DJ, Gass ML; Vulvovaginal Atrophy Terminology Consensus Conference Panel. Genitourinary syndrome of menopause: new terminology for vulvovaginal atrophy. Menopause. 2014;21(10):1063–1068.

Barton DL, Sloan JA, Shuster LT, et al. Efficacy of vaginal estradiol tablets vs moisturizer for treating vaginal symptoms in postmenopausal women: a randomized clinical trial. JAMA Intern Med. 2018;178(5):681–690.

 Faubion SS, Larkin LC, Stuenkel CA, et al. Management of genitourinary syndrome of menopause in women with or at high risk for breast cancer: consensus recommendations. Menopause. 2018;25(6):596–608.

 Clayton AH, Goldstein I, Kim NN, et al. The ISSWSH Process of Care for Management of Hypoactive Sexual Desire Disorder in Women. Mayo Clin Proc. 2018;93(4):467–487.